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Discours de S.E. Moussa Faki Mahamat Président de la Commission De l’Union Africaine lors de la 40ème Session Ordinaire du Conseil Executif

Discours de S.E. Moussa Faki Mahamat Président de la Commission De l’Union Africaine lors de la 40ème Session Ordinaire du Conseil Executif

February 02, 2022

DISCOURS

DE S.E. MOUSSA FAKI MAHAMAT

PRESIDENT DE LA COMMISSION DE L’UNION AFRICAINE

40ème SESSION ORDINAIRE DU CONSEIL EXECUTIF

ADDIS ABÉBA, 2-3 FEVRIER 2022

 

 


 

Madame la Vice-présidente du Conseil Exécutif,

Mesdames, Messieurs les Membres du Conseil Exécutif,

Madame la vice-présidente de la Commission de l’Union africaine,

Mesdames et Messieurs les Commissaires,

Madame la Secrétaire exécutive de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique,

Mesdames Messieurs les Chefs des Organes de l’UA,

Madame et Messieurs les Présidents et Secrétaires exécutifs des Communautés économiques régionales,

Mesdames et Messieurs,

En ces premières semaines de la nouvelle année, c’est avec un grand plaisir que je vous présente mes vœux de santé, de bonheur et de prospérité, pour vous-mêmes et pour vos pays respectifs.  Je formule le souhait ardent que 2022 nous renforce dans notre commune détermination à poursuivre sans relâche nos efforts de construction de l’Afrique, malgré les incertitudes et obstacles qui jonchent notre chemin.

Cette détermination c’est elle qui a inspiré l’immense travail abattu par votre Conseil tout au long de l’année écoulée, dans un environnement rendu difficile par une conjonction de facteurs négatifs.

A peine quatre mois séparent cette 40ème session de la 39ème tenue en octobre de l’année dernière, induisant de ce fait une cadence accélérée de travail à laquelle, en dépit des insuffisances dommageables du travail des Comités techniques spécialisés, votre Conseil a su s’accommoder avec flexibilité et dévouement, sous le leadership patient et méthodique de S.E Christophe LUTUNDULA APALA, Vice Premier ministre, Ministre des affaires étrangères et de la Coopération internationale de la République Démocratique du Congo, Président du Conseil exécutif.

Madame la Vice-présidente, permettez-moi de rendre un hommage bien mérité au Président du Conseil Exécutif pour la qualité de son magistère. Les annales de l’Union retiendront que c’est sous votre présidence que l’un des aspects majeurs de la réforme institutionnelle a pris corps. Il s’agit de l’entrée en fonction de la nouvelle Commission dont l’une des missions est de placer sur de solides rails sa nouvelle structure départementale.

Madame la Vice-présidente,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Comme je viens de l’indiquer, le contexte ayant caractérisé l’année 2021 se résume en un enchevêtrement de facteurs négatifs mais également des signes d’espoir pour le futur du continent.

La paix et la sécurité sont sérieusement menacées dans plusieurs de nos Régions et au sein de certains Etats membres. Les menaces se dévoilent sous plusieurs visages: conflits intra étatiques, expansion du terrorisme meurtrier au Sahel, dans la Corne de l’Afrique, dans les régions des Grands Lacs, en Afrique australe, avec une volonté affirmée de déstabilisation à grande échelle des États fragilisés par des déficiences en matière de gouvernance politique, économique et sociale.  La résurgence des changements anticonstitutionnels de gouvernement qui se sont dangereusement multipliés ces derniers mois (hier) la nuit a été longue à cause de la situation Guinée Bissau, est un signe de cette grave déviance. Les effets combinés de ces différents facteurs négatifs avec ceux des dégradations écologiques génèrent d’importants flux de réfugiés et de personnes déplacées internes, amenant ainsi au premier plan les préoccupations d’ordre humanitaire. 

Que dire alors de la pandémie de la covid19 qui, depuis son apparition il y a plus de deux ans, n’a cessé de vouloir tenir en échec nos diverses actions de riposte à travers la permanente mutation de ses différents variants?

L’impact socio-économique de la pandémie sur les économies africaines s’est traduit par la récession à laquelle se trouve confronté le continent pour la première fois depuis des décennies. Il faut indiquer que l’Afrique a connu une baisse d’activité de l’ordre de 2%, aggravée par un accroissement de l’inflation, un alourdissement du fardeau de la dette, toutes choses qui risquent de compromettre la reprise économique post covid-19 envisagée. Selon les études menées par la Banque africaine de Développement, il faudra que l’Afrique mobilise 154 milliards de dollars américains pour apporter une réponse efficace à la crise économique engendrée par la pandémie de la Covid-19. Dans ces conditions, nos attentes en matière de réalisation des ambitions de l’agenda 2063 seront sans doutes révisées à la baisse.

Au plan international, l’individualisme et les égoïsmes nationaux constituent une menace grave au multilatéralisme. En effet, ils réduisent et fragilisent tout élan de solidarité internationale.

Monsieur la Vice-présidente,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Malgré ce décor peu reluisant, la Commission et les autres organes de l’Union africaine se sont attelés à l’exécution des tâches à eux assignées par les organes délibérants dans l’exaltante perspective de faire avancer l’Agenda 2063. A ce titre, je voudrais porter à votre haute attention l’essentiel du bilan des activités accomplies au cours de l’année 2021.

La mise en œuvre du thème de l'année consacré aux Arts, culture et patrimoine comme leviers pour construire l'Afrique que nous voulons, se déroule de façon satisfaisante. Force est de constater cependant que cette thématique essentielle pour l’affirmation et la projection de la personnalité africaine ne saurait être confinée dans la seule année qui lui est dédiée. La centralité de ce thème dans l’agenda mérite la poursuite des activités pour lui donner toute la place qu’il mérite. Dans cet esprit, la biennale de Luanda continuera d’être le creuset de cette volonté d’affirmation en complément de nombreuses autres initiatives nationales allant dans le même sens. Il nous faut sans doute accélérer la mise œuvre effective du projet de grand Musée de l’Afrique à Alger.

Sur le plan de la lutte contre la covid-19 la Commission, à travers notamment Africa CDC dont la phase UNE de l’opérationnalisation est fort avancée, a poursuivi la mise en œuvre de la stratégie conjointe de riposte UA-CER-Etats membres. La communication autour des mesures de prévention a été permanente et intense. Le dépistage à travers les tests, la prise en charge des personnes infectées, la formation des personnels sanitaires dans les Etats membres et la campagne de vaccination toujours en cours, sont autant d’actions tendant à contrôler relativement le niveau d’infection.

A l’heure actuelle, les progrès en matière de vaccination anti - Covid restent faibles. Seuls 10% de la population africaine sont crédités d’un schéma vaccinal complet alors que 11% sont partiellement vaccinés. Nous restons convaincus que la production des vaccins en Afrique, déjà assez avancé dans certains de nos Etats membres, facilitera l’inversion de cette tendance négative en rendant disponibles les vaccins pour l’immense majorité de nos populations.

Par-delà la pandémie de la Covid-19, nous sommes appelés à améliorer nos systèmes de santé. Aussi faut-il saluer l’avènement de l’Agence africaine de Médicament (AMA). Le traité instituant ladite agence a déjà bénéficié du nombre requis de ratifications. L’Envoyé spécial que j’ai désigné pour assurer la promotion de cette importante agence travaille en étroite collaboration avec toutes les compétences requises pour en assurer l’opérationnalisation dans les meilleurs délais. Je voudrais lui rendre un hommage mérité et le féliciter pour son engagement, tout en lui réitérant tout mon appui dans sa mission de plaidoyer en faveur de l’agence.

Quant au processus de la réforme, il a enregistré une avancée remarquable dans ses composantes les plus expressives. Le dispositif technologique garantissant une totale transparence ainsi que le respect des critères genre et jeunesse dans le recrutement du personnel a été mis en place, en même temps que le comité de sélection des candidatures. Le processus de recrutement au titre de la nouvelle structure départementale de la Commission, enclenché avec la prise effective de fonction du Directeur général et de quelques directeurs, est planifié pour prendre fin en septembre 2022. Cette échéance aurait pu être avancée, n’eussent été les impondérables liées aux effets de la covid-19.

Dans le même ordre d’idée, des logiciels ont été installés pour accroître l’efficacité de l’audit en automatisant les conditions de transparence dans la gestion des ressources financières, inscrivant de ce fait l’obligation redditionnelle au cœur de la pratique administrative et financière. Dans le contexte de cette gestion rénovée arrimée aux valeurs de transparence et d’intégrité, les recommandations antérieures faites aussi bien par l’audit interne que par l’audit externe ont été mises en œuvre à un très haut niveau d’exécution. Un système est également mis en place pour le suivi informatique de l’exécution des recommandations issues de l’audit.

La réforme budgétaire et financière a eu pour principaux effets positifs le respect des règles d’or dans l’élaboration du budget 2022 ainsi que la gestion prudente des ressources financières affectées au titre du budget 2021.

Le maintien de ce cap présuppose que l’Union puisse compter sur des ressources financières prédictibles et qu’à ce titre les Etats membres s’acquittent de leurs contributions statutaires dans l’intervalle de temps fixé. Il nous faudra également réduire de manière significative notre dépendance financière vis-à-vis de nos partenaires.

La réforme institutionnelle va se poursuivre au niveau des autres organes, institutions et agences spécialisés non encore restructurés.

Monsieur La Vice-présidente,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

L’intégration régionale a enregistré d’importants progrès avec, entre autres, l’opérationnalisation de la Zone de libre-échange continentale africaine. L’ancrage de cette zone nécessite l’accroissement de la mobilité des personnes sur le continent. Il convient à cet effet de féliciter ceux de nos Etats membres qui ont considérablement assoupli les conditions d’octroi de visas d’entrée ou même totalement libéralisé l’accès à leurs territoires respectifs.

Ces mesures sont assurément à saluer.  La mise en œuvre effective des dispositions du Protocole au Traité d’Abuja sur la libre circulation des personnes et le droit d’établissement viendraient renforcer cette mobilité. En attente de ratifications depuis son adoption en 1990, ce Protocole n’a enregistré à ce jour que quatre ratifications sur les 15 conditionnant son entrée en vigueur.

Il est évident que sans l’entrée en vigueur de ce protocole, le fonctionnement de la Zone de libre-échange continentale africaine ne parviendra qu’avec beaucoup de difficultés à son optimum. Aussi ai-je pensé soumettre à l’examen des organes délibérants la proposition de désigner un champion au niveau hiérarchique le plus élevé qui se chargera du plaidoyer auprès de nos gouvernements et parlements en faveur de la ratification de cet important protocole.

Il est grand temps que toutes les énergies requises soient déployées pour opérationnaliser les institutions financières africaines. Leur effectivité facilitera la mobilisation des ressources financières indispensables à la mise en œuvre de nos différents programmes.

Dans le domaine de l’éducation, de la science et de l’innovation, plusieurs programmes ont été mis en œuvre dont la stratégie continentale de l’éducation pour l’Afrique, le programme d’éducation numérique, l’harmonisation des qualifications académiques sur le continent. Dans la sphère de la science, de la technologie et de l’innovation, il faut prioritairement mentionner la filière des connaissances et sciences traditionnelles africaines qui consacre ses activités à l’exploitation de la pharmacopée traditionnelle en vue de l’identification des principes actifs contre le virus de la covid-19 et d’autres maladies virales ou infectieuses.

La Commission a également poursuivi la mise en exécution des programmes liés aux infrastructures, à l’énergie, aux transports, à l’agriculture à l’économie bleue et

 L’environnement.

Sur le front social, les efforts d’émancipation et d’autonomisation de la femme en Afrique se sont traduits à travers, entre autres, le lancement du concept de « masculinité positive » débattu lors d’une réunion de haut niveau organisée par le Président de l’Union, S.E Félix TSHISHEKEDI TSHILOMBO, Président de la République Démocratique du Congo. D’importantes campagnes en faveur de l’élimination des violences faites aux femmes ont été organisées complétées par une formation en ligne pour relever le niveau de connaissance des femmes.

Dans le cadre de la représentation institutionnelle des jeunes au sein de l’Union, une nouvelle Envoyée spéciale des jeunes a été désignée en remplacement de la précédente dont le mandat était arrivé à terme et à laquelle je rends un hommage bien mérité. 

Aussi bien pour le bureau de l’Envoyée Femmes, Paix et sécurité que pour celui de l’Envoyée Jeunes, il serait sans doute indiqué d’envisager leur institutionnalisation en intégrant ces postes dans l’organigramme de la Commission de l’Union.

Monsieur la Vice-présidente,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Dans notre combat contre la covid-19 et notre projet de transformation structurelle de nos économies, nous comptons sur nos efforts endogènes tout en valorisant les contributions diversifiées de nos différents partenaires. Je voudrais saisir cette opportunité pour saluer le travail accompli par les représentations de l’UA à l’étranger auprès de nos partenaires. Nous devons renforcer la coordination dans la gestion de nos partenaires pour éviter de nous fragiliser par l’absence d’une position commune rationnellement articulée sur la prise en compte de nos principaux objectifs stratégiques.

Nos réunions sont toujours sanctionnées par des décisions dont la mise en œuvre assure l’exécution des programmes qui concourent à l’atteinte des objectifs fixés. Il se trouve, malheureusement que le taux d’exécution de ces décisions reste très faible comme l’atteste le rapport relatif à l’examen de cette question. Nous devons réfléchir aux solutions à apporter aux causes de cette déficience notoire. Ces causes sont, pour l’essentiel, l’insuffisance des ressources financières, le déficit de coordination entre les différents acteurs concernés, la non catégorisation des décisions incriminées par la Conférence en Janvier 2018, les lacunes dans le respect de l’exigence de parler d’une seule voix et surtout le trop grand nombre de programmes décidés de façon exclusivement volontariste.

Monsieur la Vice-présidente,

Mesdames et Messieurs,

Je voudrais conclure par le rappel du 20ème anniversaire de la création de l’UA et l’annonce du 40ème anniversaire de la création de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.

Ces anniversaires seront célébrés dans un contexte africain caractérisé par de nombreuses violations des droits de l’homme, par la résurgence inquiétante des coups d’Etat militaires qui, non seulement n’envoient pas une image positive de notre continent, mais sont sources d’instabilité socio-politique fort préjudiciables à tous les efforts apaisés de développement.

Je voudrais à cet égard appeler à la pleine mise en œuvre de nos instruments pertinents en la matière pour combattre la déviance institutionnelle et l’impunité sous toutes ses formes à l’échelle du continent.

Je n’ai pas de doute que votre conseil proposera à la Conférence, des projets de décisions pertinentes et courageuses sur les thématiques essentielles inscrites à l’ordre du jour de votre session à laquelle je souhaite plein succès.

Je vous remercie de votre bienveillante attention.

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